Transoxiane 2002

Arrivée à
Tashkent

 

Tout a commencé hier soir par un décollage en douceur de Roissy dans notre A310 "Tashkent" de la Uzbekiston Havo Yullari... Une fois dans l'obscurité loin des lumières de la terre, un léger repas nous a permis de nous endormir pour une courte nuit. Le réveil fut magniique avec une ligne de feu courant sur l'horizon, précédant le lever très lent du soleil, colorant le ciel d'un dégradé est magnifique. Après une collation matinale, nous sommes descendus sous la brume et les quelques nuages effilochés, et avons commencé à voir un interminable désert plissé. Peu de temps avant l'atterrissage, des champs ont enfin commencé à apparaître! Le premier arik (canal d'irrigation, spécialité ancestrale des ouzbeks qui ont fait de leur pays un désert vert) a pointé sa ligne brillante sous le soleil blanc, entouré de champs aux motifs variés. Le désert est revenu pour quelques minutes, et enfin nous avons survolé Tashkent: les nombreuses maisons et immeubles sont nichés dans des artères verdoyantes parsemées de parcs, rappelant la capitale Kirghize. L'atterrissage s'est passé sans problème et nous sommes tranquillement arrivés dans l'aéroport moderne en marbre gris de la ville, où les formalités se sont passées en douceur.

A la sortie nous avons comme prévu retrouvé Muslim et Tohir, respectivement guide et chauffeur, devant leur minivan rouge flambant neuf. Pour nous accueillir, bouteilles d'eau minérale bienvenues, et roses superflues, que Régis s'est empressé d'offrir à une belle Ouzbèke qui passait par là. Après avoir chargé l'engin, noyus partons à travers les larges avenues pourriéreuses et verdoyantes en direction de l'hôtel. Lorsque nous y sommes arrivés, nous avons déchargé nos bagages, puis après environ 4 minutes dans le hall, on nous a annoncé sans trop d'explications qu'il fallait repartir, pour le bon hôtel cette fois "moins cher et plus au centre", qui s'appelle Orzu ("rêve"). Première citation mémorable de notre guide en y arrivant: "Comme vous pouvez le voir, c'est un hôtel de rêve". Une fois les quelques paperasses d'usage remplies, nous sommes montés poser nos affaires dans nos chambres avant de descendre déjeuner au buffet très garni dans la cour de l'hôtel. Nos lits étaient recouverts de belles couvertures aux motifs champètres mêlant marron et fluo, dans le meilleur style soviétique. Ensuite après une bonne douche dans la salle de bains fleurie (avec cuvette de WC en coussins brodés), nous sommes redescendus pour partir faire un tour de ville toute la matinée. Mais auparavant, Muslim a appelé ses collègues du marché nir, afin de s'enquérir du cours de l'argent, car nous devions en changer un peu, les distributeurs étant rares par ici... Résultat des courses: dans les 1180 Sums pour un dollar, et 1050 pour l'Euro. Nous avons assisté au ballet des grosses voitures aux vitres fumées amenant l'argent, et avons bien sursauté quant nous avons vu les liasses qu'ils nous ramenaient pour une centaine d'Euros et autant de dollars: environ 4 kilos de papier!

Nous sommes enfin parti, riches comme crésus, ne sachant que faire de ces botins d'argent... Nous avons commencé par une visite éclair du mausolée aux martyrs de 1917 à proximité de l'immense tour TV soviétique très élancée (371m), dont la sphère semble pendue au milieu du vide sur un tripode effilé. Direction ensuite le monument à la mémoire des victimes du tremblement de terre de 1966, qui est une belle sculpture soviétique taillée à la serpe, d'un mari protégeant femme et enfant des éléments. Ce tremblement de terre a ravagé la ville, sans aucun bilan officiel. Nous avons continué en direction de Chorsu bazar ("le bazar des 4 portes"), ses coupoles, sa fumée, son immense halle circulaire à deux niveaux, ses commerçants racoleurs toujours souriants... Enfin, après nous être bien remplis les youx, les narines et les oreilles de toutes sortes de souvenirs, nous avons été visiter plus au calme un mausolée du XVIeme siècle, ainsi qu'une médersa à un seul niveau (elles en ont toujours 2) à l'heure de la prière.

A notre demande insistante, nous avons ensuite été prendre le métro, qui est le seul de toute l'Asie Centrale! Une fois les guichets passé, j'ai eu le malheur d'essayer de prendre une photo, mais me suis fait engueuler comme du poisson pourrit par une grosse employée qui est sortie furax de sa guitoune, croyant sans doute que je voulais la photographier. Un militaire sorti de nulle part m'a alors instantanément demandé mon passeport, et s'est mis à causer avec Muslim qui a eu la subtile idée de lui raconter que je voulais photographier les femmes Ouzbèkes pour faire voir à quoi elles ressemblent dans mon pays. Ce à quoi le soldat a répondu en demandant si nous n'avions pas de femmes dans notre pays. Enfin l'affaire s'est close lorsque le soldat m'a rendu mon passeport en fronçant les sourcils. Alors que l'autre folle criait encore, nous nous sommes engouffrés dans l'escalator en bois, dont le bruit couvrait à peine les vociférations de l'employée.

L'arrivée sur le quai nous a coupé le souffle par la beauté de la station: marbre ocre chaleureux aux murs, d'un blanc laiteux immaculé au sol, des colonnes doriques en marbre vert sombre semblant de jade de part et d'autre du quai central, dessinant une allée souterraine monumentale et soutenant des coupoles ouvragées de fines arabesques dorées. Les quais en mosaiques de marbres multicolores réfléchissaient la lumière des candélabres dorés. Les rames modernes, rapides et régulières, faisant penser au RER A de Paris, étaient entièrement peintes aux couleurs du drapeau Ouzbek: tiers supérieur azur, milieu blanc, et bas vert, avec un liseret entre chaque couleur. Les 6 phares de la voiture de tête étaient aveuglants. Bien entendu tout était propre et en excellent état. Après avoir découvert 3 autres stations lors de correspondances, toutes plus magnifiques et variées les unes que les autres (nous en avons vu d'autres plus tard qui ont encore confirmées cette impression) nous sommes arrivés au musée d'Emir Timour, après être passé dans Broadway, la longue rue piétonne et très commerçante à toute heure, située au coeur verdoyant de Tashkent. Ce beau musée est moderne, de forme circulaire sous une gigantesque coupole turquoise à cannelures, soutenues par des colonnes de marbre blanc intercalées entre de grands panneaux de verre sombre. L'immense salle centrale très richement décorée de fresques colorées et dorées nous a beaucoup plu, bien qu'étant vieille de moins de 5 ans.

Ensuite Tohir nous a rejoint pour nous emmener prendre un tranquille repas au bord d'un grand arik bleu laiteux, dont le murmure et la proximité nous ont reposés et rafraîchis. NOus avons eu le temps de discuter un peu de tout avec Muslim (en Anglais) et avec Tohir par son intermédiaire. Nous avons achevé notre repas (bouillon gras, sa aux raviloislades de crudité, brochettes de mouton) alors qu'un mariage arrivait pour le banquet (nous rappelant que nous étions samedi). Nous les avons laissé tranquilles pour aller effectuer une brève visite du musée d'arts appliqués, situé dans une riche demeure complètement décorée de bois peints, sculptés, dorés. Parmi les pièces, de nombreuses faïences, de belles soieries, draperies et peintures. Ensuite nous sommes allés découvrir la médersa des artisans où nous avons vu de magnifiques travaux manuels: miniatures, laques, ébénisterie, sculptures, etc. Ces beaux ouvrages étaient réalisés sous nos yeux par les meilleurs artisans du pays, diplômés et primés preuves aux murs. Les anciennes cellules des étudiants de la médersa qui leur servent aujourd'hui d'ateliers sont réparties autour d'une cour carrée couverte de vignes grimpantes, plantée de muriers et fleurie de rosiers. Départ pourNous sommes ensuite repartis pour Broadway en passant devant le batiment de l'Assemblée, que je n'ai pas osé prendre en photo malgré sa belle coupole bleue et ses vitres fumées (bel équilibre moderne/traditionnel) de peur d'avoir de nouveaux ennuis avec les gardes. Arrivés dans la rue ou une foule cosmopolite flânait devant tous les commerces, nous nous sommes balladé dans les échoppes au milieu des lumières, musiques, fumées de barbecues à shashliks.

Après avoir flané jusqu'à la statue illuminée d'Emir Timour à cheval, Muslim nous a invite au bistrot de son frère pour boire un coup et jouer au billard. Nous y sommes allés en métro et taxi, dans lequel nous doublions tous les trams antédiluviens en tole ondulée qui défient l'imagination en roulant encore. Une fois attablés autour d'un canon, Muslim nous a alors appris qu'il ne s'appelait pas Muslim mais Shokhrat et qu'il remplaçait Muslim au pied levé, ce dernier ayant des problèmes de famille de dernière minute. Il a laissé passer un jour voir si on était contents avant de nous le dire et nous a demandé si on souhaitait changer quelque chose nous avons dit que non non c'était très bien. Drôle de façon de faire, comme pour la visite express de l'hôtel de ce matin, mais après tout, autre lieux autres moeurs! Enfin après quelques parties plus ou moins fructueuses de billard russe, nous avons retrouvé Tohir et son va rouge, et sommes partis manger dans un resto typique une très bonne akrochka (soupe froide au lait, aux herbes et au concombre) et du mouton mitonné avec oignon et huile aux patates. Enfin le retour fut musical jusqu'à l'Orzu, avec le groupe Shaxzod à fond dans l'autoradio, dont Régis avait acheté le CD l'an dernier. Nous sommes arrivés à l'hotel où il y avait soirée karaoké dans la cour. Nous avons couvert le bruit de la seule façon possible: en mettant la clim russe en route, puis nous nous sommes écroulés comme des masses après cette folle journée. Nous avons l'impression d'être là depuis une semaine!!! Comme d'habitude, le premier jour est le jour le plus long...










 

Transoxiane 2002

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