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Laponie Suomie


L'échappée la plus boréale qui soit. Nous voici rendus à 200 kilomètres au delà du cercle polaire, en cette fin d'hiver clément. Première découverte fantastique de la Scandinavie sous son plus beau jour. Souvenirs d'une semaine presque en haut du globe...

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A quelques heures de vol de chez nous se trouve Helsinki, où l'on embarque dans un petit avion qui nous emmène loin au nord du continent. Ce survol est splendide, et donne la mesure de la nature environnante: alternance infinie de bois et de lacs scintillants couverts de neige. De temps à autre une maison semble blottie contre les conifères. Le jour baisse rapidement et l'appareil se pose sur la neige en même temps que le soleil sur l'horizon.


Une fois au sol, selon la distance on parcourt le pays soit en autocar (sur la neige, car les routes ne sont pas déblayées mais seulement dammées), en motoneige, sur un traîneau de rennes, en attelage à chiens, ou alors en raquettes. L'autocar n'a rien de spécialement remarquable, si ce n'est l'extrême souplesse de conduite des chauffeurs locaux. En effet, on n'arrête pas 20 tonnes lancées à 70 km/h en un clin d'oeil sur les véritables patinoires que sont les routes. La conduite en général demande une grande maîtrise dans ces contrées, et les étrangers recourent volontiers aux transports en commun, car la location finit invariablement dans le fossé! Pas étonnant que les Vatanen, Hakkinen et autres Raïkonen viennent de par ici.

La motoneige quant à elle, s'accommode bien de toutes les sortes de neiges, de la glace, et peut même traverser une rivière non gelée avec un peu d'élan et beaucoup de maîtrise. Les engins fournissent des accélérations et freinages stupéfiants, et permettent des pointes à bien plus de 100km/h sur les lacs gelés (pour les courageux). Leur gros défaut, c'est le bruit. Pour les attelages de chiens, le problème est inverse: les animaux sont tellement excités à l'idée de courir dans la neige, qu'ils ne cessent de japper, bondir et gémir tant que l'on ne lève pas l'ancre qui retient le traîneau en place. Une fois en route, le silence devient quasi total, et seul le glissement des patins accompagne l'effleurement des pattes sur la neige.


Et puis, il y a le magique équipage du Père Noël: le traîneau à rennes. De bien plus grande taille que celui des chiens, il permet de voyager à deux, confortablement blottis sous des couvertures de peau. Le rythme peut être irrégulier si les animaux sont capricieux, mais leur endurance est à toute épreuve. Le son des grelots qui couvrent le bât coloré et doivent effrayer les loups produit son effet féérique, et les pins comme les bouleaux semblent se pencher pour saluer au passage. Enfin, pour se balader au plus près de la nature, à son rythme et dans le plus grand silence, rien ne remplace la raquette. On peut alors surprendre oiseaux ou lièvres, et aller contempler les aurores boréales au milieu des sapins ou sur un sommet isolé.

Bien au delà de cette énumération de tous les moyens de transports nécessaires pour découvrir cette région si dépaysante, il faut bien sûr aborder la beauté des paysages. De nuit tout d'abord. En effet, ce sont généralement les villes ou les créations de l'homme qui sont admirées pour leur beauté nocturne. Mais ici, où la forêt est reine, les plus belles des illuminations sont naturelles, et l'homme n'y est pour rien. Les aurores boréales commencent à la tombée de la nuit, et rien ne permet de prédire à l'avance leur aspect ou leur localisation. Elles dépendent seulement de l'activité magnétique du soleil, et ne peuvent être masquées que par d'abondants nuages. Aussi, les longues nuits d'hiver sont propices à leur découverte.


Pour fuire les quelques lumières des maisons, on s'avance d'abord dans la neige bleutée rendue crissante par le froid de la nuit. Peu à peu la vue s'accoutume à la pénombre, et ce qui semble d'abord une illusion d'optique se révèle être le début du spectacle tant attendu. Une fois bien habitué à l'obscurité, le regard s'ouvre à la valse des voiles de lumière diaphane. Ils glissent comme soulevés par un léger vent, où s'envolent carrément, disparaissant pour réapparaître plus loin sous une autre couleur. Parfois, ce sont des rayons qui filtrent entre les nuages, ou de brefs rais de lumière courant sur le flanc des montagnes distantes. Le plus perturbant, c'est le silence, si inattendu au milieu de ces mouvements incessants et si vivants.

Tout ceci contribue à quasiment perdre pied sur la neige tantôt molle, tantôt dure, et à imaginer mille bruits au milieu des arbres environnants. La forêt vallonnée se découvre au matin, finalement paisible sous l'édredon ouaté qui s'y étend. Les reliefs anciens ne sont pas très hauts, et bien arrondis par l'érosion. Y monter offre une vue splendide au milieu de l'azur serein du ciel sans nuages. A la descente, les chaleureux intérieurs scandinaves de bois pleins de couleur offrent un bienfaisant repos. La cuisine est pleine de saveurs, riche, et proche de la nature. Mais déjà les chiens de traîneau s'agitent dans leur enclos, non loin des paisibles rennes qui grattent la neige du bout des sabots à la recherche de savoureux lichen.


Découvrir ce pays et un peu de son mode de vie hivernal a été une expérience très enrichissante et apaisante. Ici les soucis du monde paraissent bien loin, et la première priorité est le labeur quotidien. Les dons de la nature locale sont partout autour des maisons, dans les maisons, les repas, les vêtements, les modes de transports. A l'intérieur de nos frontières, c'est une bien belle harmonie de modernité et de tradition, sans complexes.

Mars 2004


























































[ Photographies non-utilisables à des fins commerciales ]
[ Canon EOS 300 / Sigma 28-200 / Kodak Farbwelt 400 iso ]


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